Fleur du Dharma

Ryuei Michael McCormick


Préface

 

Ce livre est le résultat d'années d'étude et de pratique des enseignements du Bouddha Shakyamuni et de Nichiren Shonin. Lorsque j'ai commencé la pratique du bouddhisme, je suivais des cours de présentation des religions asiatiques du Dr. William Grosnick à l'Université La Salle. Grâce au Dr. Grosnick, j'ai pu acquérir une excellente vue d'ensemble des enseignements bouddhiques de base et de leur évolution. Depuis, j'ai toujours eu à cœur de rechercher la vérité dans les différents enseignements et pratiques auxquels j'ai été confronté pendant des années, et de ne pas avoir peur de modifier ou même réviser totalement mon point de vue, si de nouvelles évidences (théoriques ou pratiques) se présentaient à moi.

Dès le début, j'ai pu constater que les sutras mahayana n'étaient pas des transcriptions littérales des sermons du Bouddha historique Shakyamuni. Néanmoins, ils sont reconnus par les bouddhistes mahayana comme étant la "parole" du Bouddha parce qu'ils sont conformes aux quatre sceaux du Dharma qui se réfèrent aux trois marques de l'impermanence, de la souffrance et de la non-substantialité de tous les phénomènes, caractéristiques de l'enseignement bouddhique. Le quatrième sceau concerne la paix parfaite du nirvana.

Les trois premiers sceaux décrivent la vraie nature de tous les phénomènes de telle manière que nous pouvons nous libérer de nos attachements aux choses incapables de nous procurer le vrai bonheur. Le sceau du nirvana décrit l'état de bonheur qu'obtiennent ceux qui ont éteint les flammes de l'avidité, de la colère* et de l'ignorance. La tradition considère comme authentique tout enseignement du Bouddha qui est conforme à ces quatre sceaux.

Les sutras mahayana ne sont pas nécessairement les paroles mêmes du Bouddha, à condition qu'ils respectent les quatre sceaux du Dharma, conformément à ses enseignements. Par leur utilisation des mythes et de la poésie, en adéquation avec l'esprit du Bouddha, ces textes se situent au-delà des mots et peuvent éventuellement être de meilleurs guides vers la véritable intention du Bouddha historique, davantage que les sutras qui se contentent d'enregistrer des événements ou des discours réels. Pour cette raison, ma confiance en la véracité des sutras mahayana, et tout particulièrement le Sutra du Lotus, n'a pas été ébranlée par la constatation que ces enseignements attribués au Bouddha sont le fait d'auteurs inconnus.

Il y a encore quelques années, j'étais persuadé que ce genre de problèmes n'existait pas concernant les écrits de Nichiren Shonin, le fondateur de l'école bouddhique dont je suis adepte. Je n'avais pas la moindre idée que, depuis un siècle, une polémique faisait rage au Japon concernant l'authenticité de nombreus écrits. Fort heureusement pour moi, ignorant la controverse, je continuais à étudier les traductions anglaises, tant authentifiées que douteuses. Grâce aux conseils de mon maître, le Rév. Ryusho Matsuda, j'ai pu discerner avec plus d'acuité les textes qui exprimaient les véritables opinions de Nichiren et ceux dont l'origine était douteuse. Je suis également très reconnaissant au Rév. Ryusho Matsuda qui a bien voulu vérifier les lettres et traités cités dans cet ouvrage pour en authentifier la provenance, les dernières recherches japonaises ne m'étant pas accessibles.

Dans beaucoup de cas, les écrits non authentifiés ou les pieuses contrefaçons peuvent néanmoins exprimer avec perspicacité les enseignements qui sont, de façon certaine, ceux de Nichiren. Ici encore, on peut appliquer le principe des quatre sceaux du Dharma. Dans le cas de Nichiren, nous pouvons également vérifier si un texte contesté confirme ou contredit les enseignements des Ecrits principaux reconnus avec certitude comme étant ceux de Nichiren. C'est pourquoi j'ai retenu dans mes citations les textes non authentifiés, selon la même logique qui m'a fait adopter les sutras mahayana d'auteurs inconnus. J'ai estimé que ce qu'ils révèlent peut nous aider à approfondir notre approche et notre compréhension du Sutra du Lotus et du bouddhisme de Nichiren.

Dans cet ouvrage, je préciserai que le texte est de Nichiren, seulement quand il a été dûment authentifié. Pour les autres, je spécifierai qu'il fait partie des écritures sacrées de la tradition nichirenienne. J'entends par là que ce texte apparaît dans le Showa Teihon, édition critique des oeuvres de Nichiren qui contient les textes authentifiés et ceux pour lesquels subsiste un doute. Le Showa Teihon est un recueil de Goibun ou Gosho, deux synonymes qu'on peut traduire par "textes sacrés" réunissant tous les écrits que les bouddhistes nichireniens ont traditionnellement attribués à Nichiren.

Pour chaque gosho cité, je préciserai s'il s'agit d'un texte de la main de Nichiren ou d'une copie faite éventuellement par un contemporain de Nichiren, ainsi que sa présence éventuelle dans l'un ou les deux premiers index constitués après sa mort. Le premier index, qui s'appelle Rokunai ou enregistrement interne, a été compilé un siècle environ après la mort de Nichiren. Le deuxième s'appelle Rokuge, ou enregistrement externe, et a été constitué près de deux cents ans plus tard. Si cette mention ne signifie rien quant à l'authenticité de l'écrit, elle permet d'en fixer la datation. Je tiens à préciser tous ces détails afin d'éviter que l'on considère ces goshos comme authentifiés et faisant autorité. Je les inclus simplement pour la beauté ou la clarté de l'enseignement. Ils ne doivent pas être considérés comme la parole authentique de Nichiren lui-même. De plus, j'ai inclus les passages non authentifiés seulement lorsque j'ai senti qu'ils correspondaient parfaitement à l'esprit de Nichiren et étaient conformes notamment aux cinq goshos principaux qui sont l'instance de référence en ce qui concerne son œuvre. Ces goshos sont : le Rissho Ankoku Ron (Traité pour la pacification du pays par l'établissement du Dharma correct), le Kaimoku sho (Traité pour ouvrir les yeux), le Kanjin no Honzon sho (Traité sur l'observation du cœur), le Senji sho (Traité sur la sélection du Temps) et le Ho'on sho (Traité sur la reconnaissance).

Les traductions du Showa Teihon utilisées dans ce livre ont été préparées par le Dr. Yumi Moriguchi-McCormick et moi-même, et corrigées par mon maître, le Rév. Ryusho Matsuda. Je ne saurais trop exprimer ma gratitude à mon maître ainsi qu'à ma femme sans l'aide desquels ce travail n'aurait jamais vu le jour.

Pour finir, les citations du Sutra du Lotus au début de chaque chapitre ont été prises dans la traduction de Senchu Murano "Sutra du Lotus". Puisque je n'emploie pas les diacritées pour la transcription du sanskrit, j'ai pris également cette liberté pour les passages du Sutra.


N.d.T : Nous continuons à utiliser ici les couleurs pour signaler la langue d'origine des termes : sanskrit, chinois, japonais.
Les citations du Sutra du Lotus sont en bleu. La traduction française, bien qu'elle soit largement inspirée de celle de J.-N. Robert, a été adaptée au vocabulaire en usage dans les écoles nichireniennes. La majuscule à certains mots ou expressions courants signale qu'il s'agit d'un terme technique généralement expliqué dans le dictionnaire.
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